Licony
On peut lire les deux orthographes : Licony ou Liconi. Il s'agit du champ d'exploitation là où le minerai a été découvert, à cet endroit il affleurait à même le sol, il était situé le plus haut en altitude. Le gisement de magnétite est un amas lenticulaire de serpentine intercalé dans des roches essentiellement de schistes calcaires au dessus et de bancs calcaires plus ou moins dolomitiques, en dessous. Cependant cette minéralisation reste très diffuse dans la roche et augmente vers l'Ouest au niveau du toit. C'est le plus grand gisement de magnétite encaissée dans de l'apatite et de la serpentine sans sulfures. La teneur du minerai est de 45 à 50%.
Cet amas de serpentine est une longue bande de 2,5km et d'une épaisseur de 100m qui affleure sur les versants Sud et Ouest du Monte Salet, le gisement de magnétite est une lentille de 50 à 70m d'épaisseur et de 600m de long qui plonge vers le Nord en se rétrécissant.
L'extraction est réalisée principalement à ciel ouvert là où le minerai affleurait, et s'enfonce progressivement en souterrain par quelques galeries. Les travaux réalisés sont anciens, peu profonds et restent anarchiques. A ce jour plus aucun travaux d'exploitation n'est visible en extérieur, tout s'est effondré, il ne reste du carreau minier qu'un mur encore debout qui représentait les anciennes trémies.
Colonna
Ce site représente le carreau minier moderne et le point central important dans l'exploitation des mines de Cogne. Il permet principalement aux mineurs de vivre à l'année à cette altitude plutôt que de monter et descendre chaque jour. Un mineur avec des enfants pouvait descendre une fois par semaine, alors qu'un homme célibataire n'était autorisé qu'une fois par mois. Le complexe construit permet de faire vivre plus de 400 mineurs à 2400m d'altitude. Une vraie prouesse ! Tout le confort était apporté pour que les mineurs se sentent bien et pour qu'ils puissent également profiter de leur temps libre.
Ici le minerai ne faisait que la translation entre Licony → Colonna → Cogne par l'intermédiaire de téléphériques. L'électricité était alors générée par l'usine de Lillaz qui arrivait directement ici.
Qui peut se targuer d'avoir une plus belle vue à son bureau ? Bien évidemment en hiver, c'était moins drôle.
Les bâtiments sont droits et austères sur plusieurs niveaux rappelant ceux d'une caserne. Pour le détachement et l'isolement, le lieu rappelle plutôt un monastère. Lors de notre visite malgré le soleil, un courant d'air frais circulait à l'intérieur des bâtiment rendant le lieu encore plus glacial et délaissé.
La première photo marque avec ce support en bois l'arrivée d'un ancien téléphérique que l'on retrouve sur la seconde photo, il ne servait plus depuis longtemps. A l'édification du carreau trois téléphériques étaient en fonctionnement :
- Téléphérique pour le personnel (cabine)
- Téléphérique pour le minerai (bennes)
- Téléphérique pour les vivres et le matériel (bennes)
Les deux photos suivantes montrent l'ampleur du carreau on a joué sur la dénivellation pour installer le complexe minier, il y a des terrasses à tous les niveaux, et cela a profité pour répartir au mieux les installations.
Enfin la dernière signale la quantité de stériles extraites de la mine et qui a été déversée sur le flanc de montagne.
A l'extrémité Est voici l'arrivée électrique, puis les forges, et les ateliers de réparation du matériel.
A l'intérieur de l'église, les peintures et notamment la grande fresque au dessus de l'ancien autel, s'effacent avec le temps, Jésus n'est plus dans la lumière, seul quelques anges sont encore visibles. Même si ces peintures sont assez grossières et parfois peu compréhensibles (il y a des personnages d'un genre préhistorique) elles sont l'oeuvre d'Adriano Sicbaldi.
Une grande majorité des bâtiments servent de dortoir ou de chambres, mais après 60 ans d'abandon, cela a triste mine. La peinture s'effrite, le carrelage tombe en miettes tout comme les briques et les tuiles. On peut tout de même penser que pour l'époque tout ceci était un gage de qualité.
Voici les lieux de détente dont notamment le cinéma et le terrain de pétanque en plein air.
Et ici la cuisine et la cafétéria avec cette grande pièce à vivre.
Ici se trouvait le téléphérique pour le personnel.
Une première inscription : minatori di cogne salutano il duce fondatore dell'impero indique : Les mineurs de Cogne saluent le chef fondateur de l'empire. Cette inscription fait référence à Mussolini, durant l'époque fasciste. Durant les années 1930 Mussolini fait une visite aux mineurs à Cogne.
La suivante presque effacée indique : il ferro vale e varra piu dell parole - minatori qui se traduit par : le fer vaut et vaudra plus que les mots - les mineurs.
Derrière le réfectoire, accolé au téléphérique, voici le couloir et le reste de l'escalier qui permettait de rejoindre directement l'ancien téléphérique, que l'on verra plus bas. Juste au dessus on verra la lampisterie avec encore écrit les matricules des ouvriers.
Ci dessus se trouve successivement :
- La galerie du personnel, c'est par ici que les mineurs accédaient à la mine.
- La galerie des trémies, les bennes du téléphérique rentrait directement dans la galerie, se remplissait au passage des trémies puis effectuaient un demi-tour afin de redescendre dans la vallée.
- La galerie d'extraction, où les trains vidaient le minerai qui atterrissait dans la galerie des trémies, mais aussi à la vidange des stériles à l'extérieur
Quelques galeries creusées dans le rocher permettaient aux ouvriers d'accéder plus rapidement à des secteurs clés du carreau, comme la galerie du personnel ou vers le téléphérique, notamment par mauvais temps ou tempêtes de neige, évitant ainsi de sortir dehors.
Costa Del Pino
Ce carreau est situé entre Cogne et Colonna, c'est une station intermédiaire représentant véritablement les derniers grands travaux d'envergure de la mine. Plutôt que de faire sortir le minerai de Licony, puis vers Colonna, et enfin vers Cogne, un plan incliné est directement creusé entre Licony et Costa Del Pino, réduisant ainsi le transport d'au moins un téléphérique. Tout le minerai est évacué par cet étage, là où se trouve également les premières opérations de concassage du minerai ainsi que les compresseurs. Toute cette partie est installée directement en souterrain.
Un travers banc de plus d'1,3km connecte l'entrée au gisement où se trouve le plan incliné.
Le 9 Septembre 1963, lorsque cette nouvelle infrastructure est opérationnelle elle rend le carreau de Colonna obsolète et celui-ci devient petit à petit abandonné.
Seul reste en fonction les téléphériques de Costa-Del-Pino vers Cogne.
L'exploitation de la mine se fait par plusieurs niveaux :
- 2414m
- 2363m
- 2300m
- 2265m
- 2214m
- 2168m
- 2144m
- 2120m
Une galerie dessert chaque niveau et permet d'accéder aux chantiers. Cette galerie est reliée au skip par l'intermédiaire de puits internes en début de galerie où sont stockés soit le minerai soit les stériles.
Le minerai une fois extrait est convoyé par des wagonnets où il est chargé par des pelles mécaniques jusqu'au trémies de niveau. Ces trémies alimentent le skip en minerai et en stérile qu'il fait descendre jusqu'au niveau 2088. Le minerai est stocké dans un énorme silo de 518m³ avant d'être concassé dans deux concasseurs (l'un en réserve, l'autre en fonctionnement).
Le tout est ensuite transporté par un train de neuf wagons, de 8 tonnes chacun dans la galerie d'extraction de Costa Del Pino. Cette galerie est en très légère pente de 2031m à 2027m. Les wagons sont vidés dans un silo situé sous la voie, le minerai est ensuite acheminé par bandes transporteuses, jusqu'aux bennes de chargement (téléphérique) qui descendront jusqu'au lavoir. Les stériles sont rejetés à l'extérieur.
Bienvenue à Costa Del Pino avec un panorama sur le Gran Paradiso et dans le fond, quand il fait beau sur le Mont-Blanc.
Voici la salle des compresseurs avec leurs réservoirs d'air.
Ce premier compresseur est le dernier à avoir été installé, c'est le plus puissant et remplace tous les autres.
Ce plan incliné servait à monter le bois.
L'ancienne poudrière s'est désormais transformée en cave à vins.
Station de téléphérique - Personnel
Le téléphérique fonctionne aujourd'hui avec ce petit treuil au centre qui marche au diesel dont on voit principalement la poulie de renvoi.
Mine
Les porions ont des casques blanc, les ouvriers des casques marron.
Le minerai est vidangé ici dans un grand accumulateur sous la grille, puis il tombe dans une série de trémies qui alimente une bande transporteuse.
C'est ici que le minerai est concassé, au dessus de cette salle se trouve le plus gros silo de la mine.
En visitant les quelques galeries on s'aperçoit vite que toutes les galeries de circulation sont muraillées en béton, il s'agit de travers bancs. Cette trémie récolte les stériles, et cette pompe servait pour l'exhaure.
Cette galerie amène vers un petit barrage et un autre plan incliné qui est aménagé afin d'évacuer l'exhaure.
Voici le skip qui parcourt le plan incliné et récolte le minerai aux différents niveaux. Ce plan fait à peu près 800m de longueur pour 400m de dénivelé, le skip peut charger jusqu'à 10 tonnes de minerai, il avance par un système de contrepoids à la vitesse de 5m/s. Le treuil est situé au niveau 2363m. Le skip est vidé à 2072m.
Station de téléphérique - Minerai
Voici la station de chargement du minerai, il n'y a plus aucune bennes elles ont toutes été descendues au musée.
On peut voir les trémies de stockage et le poste de chargement.
Au fond se trouve par contre toute la machinerie du téléphérique.
Cogne
C'est ici que se trouve, les infrastructures liées au traitement du minerai et les logements des mineurs dans ce que l'on appelle "le village des mineurs" qui forme un ensemble de maisons dans le quartier Miniera. En 1919 sont construits les stations de départ des téléphériques, la centrale électrique, les compresseurs, l'atelier mécanique et de réparation, le village des mineurs ainsi que les installations de broyage, nettoyage et séparation magnétique du minerai.
En 1918 l'installation hydroélectrique d'Aymavilles est mise en service.
Musée de la mine
Installé dans d'anciens bâtiments liés à la mine, le musée permet de retracer l'histoire et l'évolution des techniques employées dans la mine.
On pourra notamment admirer une luge (reconstituée) qui permettait au tout début la descente du minerai, il parait qu'en 20 minutes on arrivait jusqu'à Cogne. Mais ce moyen de transport a aussi causé un grand nombre d'accidents et surtout mortels. Outre la panoplie d'outillage classiques des mines on observera un authentique Pneolator de MSA datant des années 1950 et qui permettait en fonction du patient (nourrisson, enfant, adulte) à l'aide d'un masque et d'une bonbonne d'oxygène d'aspirer un gaz inhalé. Enfin le clou de la visite, permet d'observer une locomotive ainsi que sa rame de wagons qui tirait le train de minerai et qui circulait entre Cogne et Eaux-Froides.
Village des mineurs
Le site représente actuellement une dizaine de maisons situées au plus près du téléphérique et des installations de traitement du minerai.
Au milieu du site se trouve encore l'ancienne station de téléphérique qui reliait directement Colonna, aujourd'hui entièrement vide.
Station de téléphérique - Personnel
Là où se situe actuellement le musée de la mine se trouve la dernière station de téléphérique construite, c'est celle qui accueille la montée et la descente du personnel vers Costa Del Pino et à côté la station de téléphérique pour le minerai. Ce téléphérique n'est quasiment plus utilisé (il faut des autorisations).
Station de téléphérique - Minerai
Les bennes arrivant de Costa Del Pino pleines de minerai étaient vidées par basculement vers une grille au niveau du sol où le minerai partait directement au lavoir. Chaque benne peut stocker approximativement 1100kg de minerai. Les bennes faisaient un circuit en demi tour et une fois vidées elles regrimpaient, vides, direction Costa Del Pino.
Le câble fait demi tour grâce à deux poulies positionnées verticalement et parallèle, le câble s'enroule dans la première vers le bas, où une troisième poulie positionnées cette fois-ci horizontalement permet la translation et remonte dans la dernière en hauteur et repartir.
A l'arrivée, la benne avance sur un rail en hauteur, chaque benne possède des poignées qui permette de la faire avancer ou de la tirer, une commande permet le basculement de la benne, une fois vidée, elle repartait s'accrochait au câble porteur.
Enfin dans la boucle de demi tour, une benne pouvait sortir du circuit pour aller vers un atelier de réparation, pour enlever ou rajouter des bennes.
Lavoir
Le minerai arrivant de Costa Del Pino était stocké dans un silo de 1500 tonnes. Le minerai était broyé une première fois (hydrocône) et ce qui était encore trop gros l'était de nouveau par un concasseur à mâchoires. Le tout était ensuite envoyé vers une série de cribles puis vers la séparation magnétique qui séparait le minerai dit primaire (55%) du secondaire (35%). Les stériles étaient séparés des autres éléments qui les constituaient dont le sable.
Le minerai primaire était envoyé directement en fonderie tandis que le minerai secondaire était envoyé vers une usine d'enrichissement.
Le minerai était trié en fonction de sa taille : 18mm, 35mm, 50mm et les stériles.
Puis le minerai était séparé en fonction de sa teneur sur les 18-35mm (55% et 35%) et les 35-50mm (55% et 35%).
Enfin il était stocké dans des silos différenciés avant de partir par train.
Ici se trouve le concassage primaire avec le concasseur hydrocône Alice Chalmers ainsi qu'un concasseur à mâchoires.
Voici les cribles pour les différentes tailles de minerai.
Et voici les séparateurs magnétiques pour la teneur du minerai. A côté avec la noria ce sont pour les stériles.
Enfin voici les silos de stockage du minerai et des stériles.
Ligne de chemin de fer
La première phase de travaux de la ligne de chemin de fer reliant Cogne à Aoste est commencée durant l'été 1916 et se terminera pour l'inauguration le 18 octobre 1922. La voie alterne passage à ciel ouvert et passage en tunnel. Trois tunnels sont creusés au total.
Ils sont construit selon les plans de l'ingénieur Gilardi de Milan, 11645m de voies au total dont 8225m passant en tunnel, ce qui en fera le plus long tunnel en cumulé d'Europe à voie étroite.
A la sortie des trois tunnels à Eaux-Froides, le train empruntait encore un bout de voie pour arriver à la station de Charemoz où le minerai était vidé et chargé de nouveau en bennes pour descendre la vallée dans un dernier téléphérique de 4,2km de longueur et de 1040m de dénivelé. Celui-ci était divisé en deux avec une station intermédiaire, celle de Lisettaz. Une fois arrivé à l'usine près de l'agglomération, le minerai était stocké dans des silos pouvant accueillir 15000 tonnes.
Pour résumer, en distance cumulée le minerai était transporté sur 18km (1922) :
- Colonna → Cogne : 2,2km
- Cogne → Eaux-Froides : 11,6km
- Eaux-Froides → Aoste : 4,2km
Voici la Galleria di Cretaz longue de 900m. L'entrée est datée de 1921 et la sortie de 1922.
Et voici le départ de la Galleria del Drinc, le plus long tunnel mesurant 6,7km, il est daté de 1925.
Aoste
L'usine sidérurgique installée à Aoste s'appelle "La Cogne", elle est spécialisée dans la fabrication de produits en acier spéciaux.
L'usine était dépendante de plusieurs matières premières qui provenait des mines de la région :
- La magnétite, des mines de Cogne
- Le charbon, des mines de la Thuile
- La chaux des carrières de Jovençan
L'usine a changée de noms à plusieurs reprise et s'est ainsi appelée :
- Società Ansaldo-Cogne
- Società Anonima Nazionale Cogne
- Ilva Cogna SA
- Cogne Aciers Spéciaux (CAS)
L'usine dispose actuellement d'un four électrique de 90 tonnes, d'un four de rechauffement de 80 tonnes, d'un four RH sous vide, d'une poche de décarbonisation à l'argon et oxygène de 80 tonnes, d'une coulée en lingots, d'une coulée continue à 4 lingots, d'un atelier de forgeage. L'usine produits des aciers spéciaux pour laquelle elle est reconnue notamment des barres, des blooms, du fil, des valves.